[ Aller au nouveau Forum ]

Le Monde, aujourd'hui...


[ chronomania.net - Les archives de l'ancien forum ]


écrit par jean alexis le 07 juin 2002 16:50:30:

Une nouvelle génération de braqueurs pille les boutiques de luxe
Ils sont généralement jeunes, lourdement armés, font preuve d'un professionnalisme et d'une audace confondantes, et s'en prennent en plein jour aux joailliers et agents de change des beaux quartiers. Selon les enquêteurs, ils n'ont plus grand chose à voir avec les bandits d'antan.
Cela ressemble à une réunion de crise. Le préfet de police de Paris Jean-Paul Proust devait recevoir, vendredi 7 juin, des représentants des organisations professionnelles de bijoutiers, au lendemain d'une nouvelle tentative d'agression contre deux commerces à Marne-la-Vallée (Seine-et-Marne), qui s'est conclue par trois interpellations.




Sur le même sujet
Les joailliers, inquiets pour la sécurité de leurs boutiques, hésitent à les "transformer en blockhaus"
• LE MONDE | 07.06.02 | 11h39


La rencontre a pour objectif d'améliorer la sécurité d'établissements qui ont été visés par une série d'attaques à main armée depuis la fin 2001. Bijoutiers prestigieux de la place Vendôme, en face du ministère de la justice, commerces au luxe plus anonyme et bureaux de change ont été la cible privilégiée d'une nouvelle génération de braqueurs aux contours encore mal définis chez qui les policiers voient cependant de troublantes affinités dans la façon d'opérer.

CHEZ LEURS PARENTS

L'enquête de la brigade de répression du banditisme (BRB), qui avait abouti, début avril, à l'interpellation d'une douzaine de personnes, est citée en exemple. Après des semaines de travail, les policiers avaient démantelé deux équipes spécialisées dans les agressions contre les bureaux de change, qui n'avaient avec les figures du milieu traditionnel qu'un seul point commun : un professionnalisme irréprochable. Ils étaient lourdement armés, - pistolets automatiques, fusils d'assaut Kalachnikov -, agissaient cagoulés et gantés, disposaient d'une discrète base de repli en Seine-et-Marne, et utilisaient des voitures volées quelques jours avant de passer à l'action, des véhicules bien choisis. "Ils pouvaient atteindre des vitesses de 200 à 250 km/h, et pouvaient semer les voitures de police", souligne un enquêteur de la BRB.

Pour le reste, ils n'ont, selon les policiers, plus rien à voir avec les braqueurs d'antan. Les trois personnes placées en garde à vue, jeudi 6 juin, après l'attaque à main armée manquée au centre commercial du Val d'Europe à Marne-la-Vallée étaient âgés de 19 à 25 ans et originaires de cités du Nord de Seine-Saint-Denis.

Certains habitaient encore chez leurs parents, qui ignoraient parfois leurs activités, comme l'a montré la BRB. "Ils constituent des bandes qui restent dans leur cité, témoigne un policier. Autrefois, les braqueurs qui réussissaient de gros coups quittaient leur quartier et s'installaient dans des maisons. Ce n'est plus le cas, ce qui rend l'enquête d'autant plus difficile."

Le passage à la grande délinquance est parfois brutal. Ces nouveaux braqueurs n'étaient jusque-là connus localement que pour de petits délits. "Du jour au lendemain, résume un autre policier, ils sont passés de l'attaque de la boulangerie au braquage du bijoutier ou du bureau de change."

Les méthodes pour écouler le butin font aussi de ces nouveaux braqueurs une génération hors norme. Selon les policiers, ils ne cherchent pas nécessairement à "vendre" à l'extérieur de la cité, où le beau bijou, la montre de luxe sont très prisés. Un enquêteur de la brigade criminelle rappelle que lors de son assassinat à Paris, Antonio Lages, l'une des figures montantes du milieu, avait au poignet une montre d'une valeur de 120 000 francs (environ 18 000 € ), alors que sa seule source de revenus avouée était le revenu minimum d'insertion (RMI). Lorsque elle recourt aux receleurs, la nouvelle génération a tendance à brader. Les bijoux de luxe sont parfois soldés jusqu'à un vingtième de leur prix. "Nous avons retrouvé la trace d'une équipe qui avait dérobé des tableaux de maître, raconte un enquêteur de la BRB. Ils les avait revendus de 10 000 à 15 000 francs [entre 1 525 et 2 286 € ]".

VITRE CHAUFFÉE AU CHALUMEAU

La série d'attaques qui a visé à la fin du mois de mai et début de juin des bijouteries de la place Vendôme et un bureau de change de l'avenue des Champs-Elysées, en plein jour, présente, selon les policiers, un air de ressemblance avec les habitudes de ces fameuses équipes. Dans le bureau de change, un coup de feu a été tiré, et l'un des agresseurs a pris le soin de ramasser la douille avant de quitter les lieux. Sang-froid, professionnalisme, souci de ne pas laisser de traces, ces braqueurs encore anonymes choisissent bien leurs cibles. Les banques, dotées depuis plusieurs années de systèmes de sécurité efficaces, ne sont plus visées. Les bijouteries, moins bien protégées, ou les bureaux de change où des sommes d'argent importantes sont plus facilement accessibles, sont particulièrement visées. Sur les Champs-Elysées, 100 000 euros ont été volés. En 2001, le bijoutier Boucheron, place Vendôme, s'était fait dérober un collier de près de 8 millions de francs. Les agresseurs avaient chauffé la vitre blindée, pourtant épaisse de quinze centimètres, avec un chalumeau, puis l'avait abattue d'un coup de masse.

Les policiers se gardent cependant de suspecter ces nouveaux braqueurs de toutes les agressions depuis un an. Les enquêtes dans les cités sont difficiles à conduire, les surveillances, les filatures y sont plus difficiles, même si la BRB est désormais dotée de caméras de surveillance, et de balises GPS. Et la tradition n'a pas totalement disparu, comme en témoigne le hold-up chez le bijoutier Fred, samedi 25 mai. Deux hommes entrent dans l'établissement sur le coup de midi. Ils portent des lunettes de soleil, mais ne sont pas masqués. L'un d'eux dissimule une grenade dans un bouquet de fleurs. Après avoir neutralisé le vigile avec une bombe lacrymogène, ils se sont emparés des plus beaux bijoux en devanture, d'une valeur estimée à plus de 6 millions d'euros. Selon les policiers, il s'agit cette fois de "professionnels de haut de gamme du vol par ruse", et les objets volés sont sans doute déjà à l'étranger.

Pascal Ceaux



Réponses:


[ chronomania.net - Les archives de l'ancien forum ]